mardi 8 octobre 2013

Tourment

Durant la nuit qui suivit sa rencontre avec Sacha, il fit un cauchemar terrible. 

Depuis qu’il dormait seul, il avait rarement l’occasion de se rappeler de ses rêves. Comme si l’absence d’une personne bienveillante, avec qui partager ce brin d’intimité, l’en empêchait.

Au matin, il nota sur son bloc à spirale ce dont il se souvenait :
« Je me tiens figé devant la penderie de ma chambre. Je découvre avec effroi qu’aucun des vêtements qui s’y trouvent ne m’appartient. Pour en être certain, je les serre un à un contre moi. Trop grand, trop petit. Ils sont de surcroît dans des coloris bariolés que je n'ai absolument pas l’habitude de porter et des coupes aux antipodes de ce que je revêts d'ordinaire. Je me vois pourtant contraint de mettre quelque chose sur moi. Un réveil gigantesque, digne d'un Tex Avery, indique déjà l’heure à laquelle j’ai mon premier rendez-vous de la journée.»

La sonnerie de son portable avait mis fin à ses égarements. 

Nu comme un ver, alors qu'il écoutait vaguement son interlocuteur, il se demanda en s'enveloppant dans le drap, quels vêtements il aurait choisis s'il avait eu le temps de dormir davantage.  

Ses chemises blanches rayonnées face à lui, tel un arc en ciel après la pluie. "Je serais resté à poil, c'est pas grave." pensa-t-il. Il aimait le son de cette pensée : "C’est pas grave". Lorsqu’il était enfant, il aurait aimé l’entendre sans arrêt, pour être rassuré.

Il revint à la conversation téléphonique avec son agent : "Je suis navré, Paul. Disons, plutôt demain dans l'après-midi. Excuse moi, je préfère raccrocher".

C'était exactement cela. Raccrocher était le terme.  En repensant à la lettre, il réfléchit : "Peut-être est-il tant que je cesse d'écrire maintenant."

2 commentaires:

  1. Etant dans le secret des dieux (ou plutôt de la déesse), rassurons nous autrement que par "c'est pas grave"... Nous allons l'avoir cette lettre, mais que ne va-t-elle nous perturber plus encore !!!

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  2. Non mais attends un peu que CCLP retrouve le cahier, sinon Macache bono !

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