jeudi 3 octobre 2013

Et si Lionel Duroy devenait un personnage de fiction?


Une voix seule suffit à me faire chavirer ce jour-là. La sienne, celle de cet homme dont j’ignore tout, excepté son statut d’écrivain qui l’emmène à parler de livres sur France Culture.

Il fait un temps de rêves dehors. J’ai entrepris de repeindre mon salon couleur taupe, bien au frais. La radio me donne du courage. Toute cette vie dans cette âtre sonore et lui, tout à coup, qui en sort comme un diable de sa boite.  Je n’entends que son prénom. Il lit un passage de ce qu’il a écrit dans son dernier ouvrage. 

Sensation d’une balle perdue. Je descends de mon échelle et  m’assois à même le sol. La fraîcheur des carreaux me fait l’effet d’un saut d’eau froid en pleine face. Il s’est tu le temps que je reprenne mon souffle mais réattaque aussitôt avec une deuxième salve : « L’amour…. ».


Il a prononcé le mot et je le sens plus miséreux encore. J’ai envie de lui donner un bon repas, de l’entourer d’affection et de mes bras enveloppants. J’associe mes pensées aux paroles de Mère Téresa : « Le manque d’amour est la plus grande pauvreté ».

Je n’en peux plus de tant de souffrance. Heureusement l’interview se termine. Un générique de fin guilleret me ramène à mes pinceaux. Il faut que j’avance. Lui et ses livres attendront. Mais je me soucierai de lui, j’en suis certaine.

La nuit ne fait que confirmer qu’il m’a atteinte. Durant six heures, je me tortille sous mon drap pour décider, au petit jour, de lui écrire. Une sorte de lettre de vengeance de m’avoir fait passer une si mauvaise nuit.

Je fais preuve d’une sincérité extrême. Jamais je n’ai été aussi vraie dans un courrier. Comme à poil. J’imprime, je signe, je plie la lettre et l’insère dans une enveloppe. Je m’y reprends à 5 fois pour la rédaction de l’adresse. Mais il faut qu’elle parte aujourd’hui. 

Je parviens à un résultat  qui me convient, colle un timbre que je choisis volontairement neutre, sans image aucune, à part la traditionnelle Marianne. Elle me sourit. Pour ne plus voir son sourire de Joconde, je la fourre dans la boite à lettres la plus proche de mon lieu de travail.


Ma bouteille à la mer devrait parvenir à Paris demain. En y repensant, nous sommes le 22 août, date de parution de son nouveau livre. Il aura terminé ses vacances et ne tardera pas à me lire.

Je dors mieux. Il faut dire que j’ai passé une partie de la journée à chercher qui il est. Je me sens comme familière de cet homme. Il parle beaucoup de sa vie personnelle en décrivant le contenu de ses livres. Divorcé, remarié, des enfants, un pied à terre au Mont Ventoux, le vélo et les femmes. Sa mère d’abord, les autres ensuite et l’amour de sa vie : l’écriture.

Je vois son visage. La première chose qui me frappe est cette fragilité qui lui donne l’allure d’un petit garçon à pourtant 63 ans. On dirait qu'il plisse les yeux à l'affût d'une gifle. Ses cheveux plutôt longs pour son âge le protègent sans doute un peu. Il garde le front haut, comme dans l’attente d’un baiser qui se poserait dessus. J’ai envie de l’embrasser.

2 commentaires:

  1. L'Aristo...octobre 04, 2013

    Lionel, répond lui vite, on est entrain de la perdre !!!

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    Réponses
    1. « Houston, we've had a problem » c'est ça ?
      Tu joues les tours de contrôle la Baronne ? Cela ne m'étonne pas de toi :)
      J'y vois deux raisons :
      1- ta capacité à repérer mes "Phôtes" d'orthographe (merciiii),
      2- ta taille (Hi-Hi).

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